Données publiques et journalisme:|| une mine de richesses!

Le 7 juillet 2010

Libérez les données publiques gratuitement ! Une fois de plus, cette demande a été émise lors de la seconde conférence Lift France (technologie & prospective). Leur utilisation dans le domaine de l'information présente un intérêt énorme.

Le journalisme de données commence à prendre son essor en France, mais les données publiques, contrairement à d’autres pays, n’y sont pas encore totalement libérées ou facilement accessibles.

Cette semaine à Marseille, lors de la seconde conférence Lift France (technologie & prospective), les appels se sont multipliés pour libérer gratuitement les données publiques. L’enjeu est économique, démocratique et social. Les données sont le pétrole de la nouvelle société de l’information.

Hélas, aujourd’hui, « nous avons l’état d’esprit du 19ème siècle, les méthodes du 20ème et les besoins du 21ème », a joliment résumé Sam Pitroda, conseiller en technologies de l’information du Premier ministre indien.

Nous avons souvent dit, ici, comment l’exploitation et la visualisation de données, permises par les nouveaux outils numériques et l’Internet, comptaient parmi les pistes les plus prometteuses du journalisme de demain. Le journalisme sportif et le journalisme financier en sont les premiers utilisateurs. Est-ce un hasard si ce sont deux types de journalismes à plus fortes valeurs ajoutées, mieux monétisables ?

Pour le reste, il faudrait quand même que les données soient disponibles !

La France en retard

Les États-Unis et la Grande-Bretagne ont ouvert ces dernières années des portails de données publiques, des répertoires gratuits : Data.gov et Data.gov.uk. Au Royaume-Uni, c’est une campagne de pression du Guardian durant quatre ans qui en est largement responsable. Tim Berners-Lee, l’inventeur du web, a donné un coup de main ! La Banque Mondiale propose aussi un accès à ses données.

La France n’a pas encore de portail, et son projet, s‘il reste de vouloir faire payer, de verrouiller de limiter l’accès, ces données, risque de l’isoler en Europe et d’empêcher la création de services d’informations à valeur ajoutée, de promouvoir de nouveaux usages, de développer de nouvelles activités et de nouveaux intermédiaires. En bref, de favoriser une véritable industrie de la connaissance dans laquelle le public aura aussi un rôle important (intelligence collective, “crowdsourcing”, ré-utilisation des données). À moins que les hackers ne s’en occupent directement !

Le journalisme de données, un chemin prometteur mais compliqué

Quant au journalisme de données, c’est à la fois simple et compliqué.

Simple, car il s’agit simplement de transformer des données en information, en connaissance, en savoir. Traiter, analyser, donner du sens, c’est le propre du journalisme.

Compliqué, parce qu’il faut d’abord collecter, trier, et exploiter les données, les statistiques, les chiffres qui inondent le web, puis les scénariser et les visualiser sur écran de manière éducative, ludique, informative. Et surtout, il faut faire travailler ensemble des métiers différents : journalistes, développeurs, designers web, statisticiens, graphistes…

C’est surtout l’un des rares champs de fort développement potentiel et de création de valeur pour les entreprises de médias au niveau commercial (pour des sites web de médias) car il favorise immersion, engagement et interactivité, éléments clés pour monétiser davantage les sites d’infos (temps passé, voire partie payante).

C’est aussi un potentiel éditorial, pour de l’investigation et des scoops (rappelez-vous les notes de frais des députés britanniques), pour du contexte et de la mise en perspective historique et géographique. Mais aussi pour réduire le “bruit”, diminuer « l’infobésité » croissante, la surabondance d’infos, le déluge informationnel.

C’est souvent aussi rendre compréhensible la complexité, en s’adressant à l’intelligence visuelle du public. L’angle “data” du journalisme va se développer comme un nouvel angle de narration.

Des projets qui déjà foisonnent

Rappelons que, durant la campagne électorale d’Obama, la page du site web du New York Times la plus consultée fut une infographie animée du financement de la campagne démocrate, alimentée par des données et scénarisée.

La BBC vient donc de lancer un site (DataArt) pour évangéliser sur ce potentiel. Google vient de proposer une version allégée de son logiciel “GapMinder” à télécharger, et le site Tableau Public propose des outils en open source.

En France, deux équipes – des pure players – s’y mettent aussi. ActuVisu.fr, ouvert le week-end dernier, associant étudiants et développeurs sur le thème “l’information vous saute aux yeux (…) ou l’art de faire parler les données“, et OWNI, laboratoire de journalisme numérique, dont une partie est dédiée au “data journalism”.

La presse régionale, qui émet de grandes quantité de données (faits divers, travaux publics, météo…) devrait aussi rapidement profiter de ce potentiel.

Parmi les meilleures ressources web sur ce sujet :

Billet initialement publié sur AFP-MediaWatch.

Image CC Flickr aurelio.asiain

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