#Hadopi2, #Loppsi2 > Viol au dessus d’un nid de coucou

Le 12 juillet 2009

Ils vous expliquent par amendements et saillis médiatiques interposés qu’ils luttent contre le piratage, qu’ils luttent contre la pédocriminalité, que leurs ennemis sont aussi les ennemis des artistes (ce qui fait rire jusqu’à St Germain des Près mais qui “en remue une sans faire bouger l’autre” à Monsieur Michu) et que ceux qui s’opposent aujourd’hui [...]

Ils vous expliquent par amendements et saillis médiatiques interposés qu’ils luttent contre le piratage, qu’ils luttent contre la pédocriminalité, que leurs ennemis sont aussi les ennemis des artistes (ce qui fait rire jusqu’à St Germain des Près mais qui “en remue une sans faire bouger l’autre” à Monsieur Michu) et que ceux qui s’opposent aujourd’hui au filtrage du net sont, ni plus, ni moins, que les défenseurs des pédophiles ! Là, Monsieur Michu voit rouge. On ne touche pas aux petits enfants !

Oui mais… Quand demain tombera la première étude révélant que le taux de résolution dans les affaires de pédocriminalité a dramatiquement chuté depuis la mise en place de ces mesures (car les pédophiles sont ailleurs, devant, loin, et le combat technologique déjà perdu par les gouvernements) il sera bien trop tard : Vos mails seront filtrés, vos PC équipés de mouchards, la justice se fera sans juge et la présomption d’innocence tiendra du vieux souvenir poussiéreux.

Hadopi2 réintroduit le filtrage des “communications électroniques” faisant le pont avec le projet de loi Loppsi2 (ex Lopps sous Pasqua, puis Loppsi – une sorte de “NouveLopps” façon 1984, année symbole de tous les renoncements).

Relire Eben Moglen peut, à ce stade, s’avérer utile :

“Rien ne sert de s’énerver : il faut juste les ignorer, se battre pour qu’ils ne changent pas trop la loi, et continuer à programmer du code comme nous le faisons depuis 20 ans maintenant : nous avons le matériel, les logiciels, la bande passante, la culture, les talents…

Nous n’avons besoin de rien, ni de changer la loi, ni d’en faire adopter de nouvelles, ni de détruire ni de créer quoi que ce soit, ni de “venture capitalists“, ni de position monopolistique… La beauté de notre position tient au fait que de toute façon nous gagnerons, alors laissez-nous tranquille. La seule chose que nous demandons, à l’Etat, c’est d’éviter de créer des injustices au bénéfice de quelques-uns.” (texte intégral sur Owni, via ce billet de Jean-Marc Manhack)

Hadopi2 et Loppsi2 ne violent pas seulement nos libertés individuelles… Et à ce propos, qui en France aujourd’hui est près à se battre pour la défense de ses libertés ? Et si c’est bien un système totalitaire et dictatorial qui se met en place  peu à peu et à marche forcée sur la toile, nous ne sommes pas pour autant dans un pays dont on puisse dire qu’il tienne de la dictature, IRL… N’est-ce pas ?

C’est une démocratie, et seule une démocratie, qui peut permettre ce débat de fond
. Mais c’est une démocratie du renoncement et du cynisme qui peut, seule, laisser passer de tels projets de lois. Une ploucocratie de l’émotion.

Les libertés ou les petits enfants ? Les deux ! Et surtout pas l’un contre l’autre ! Loppsi déservira, tout comme Hadopi et bien plus dangereusement, les desseins qu’elle prétend servir.

“Quiconque est prêt à sacrifier sa liberté pour une sécurité provisoire ne mérite ni l’un ni l’autre” (Benjamin Franklin)

Notre société carbure à l’addiction. Nous sommes drogués au quotidien. Toutes les révolutions, avant de faire le tour d’elle même – pour ne pas aller, souvent, ni loin ni droit – sont avant cela insurrections, des jaillissements hors de nos accoutumances.

Les cyber-punks que nous sommes auront leurs propres insurrections. Celle qui vient a déjà entamé son ébullition.

Elle est révolte contre les restrictions des libertés et autres remises en cause de l’abondance ou de la neutralité, au pays HTML des bisounours numériques.

Ailleurs, “dans la vraie vie”, disent-ils, où ces combats ont de longue date étaient perdus, avancent inégalités croissantes et mollesse consumériste.

ça et là émergent des archipels de violence ou des fulgurances de lucidité, toujours chloroformés jusque-là par ceux qui ont aimé danser sur Abba et pleurent Bambi (…).

Le monde d’hier va à l’aumône une dernière fois sous nos yeux, en rien ébahis. “Ils” s’en sortent trop bien. “Ils” ne sont que nos abandons, nos renoncements.



Nous sommes le peuple du plastique et de la carte à puce.

Nous sommes les années du cynisme, des boursouflures des égos et de l’immense mensonge de la fin de l’histoire, de la lutte des glaces, des subprimes et du green-washing.

Nous avons défilé contre l’interventionnisme, voté contre la technocratie ou jamais voté, puisque blancs ou noirs nous ne sommes pas reconnus.

Nous ne sommes bannis d’aucun lieu, nous avons bannis les lieux pour les liens, et regardons “hier” avec le dos courbé quand nous fixons “demain” la tête droite et le majeur tendu.

La culture est une arme. l’entreprise est une arme. la rue est une arme. le net est une arme. Je suis contre le port d’arme. nous sommes tous déjà armés jusqu’aux dents. C’est le port du courage qu’il serait bon de remettre en vogue.

Face à ces lois iniques et à une politique absconce qui ne sait que créer dettes, inégalités sociales croissantes et régression des libertés, qui se lève ? Qui se soulève ? Qui contre-argumente ? Qui contre-enquête ? Qui, pour se battre ?!

“Plus nous accroitrons notre liberté, mieux nous communiquerons”
écrivait, en 1984 justement, Timothy Leary, reprenant Foucault (“les techniques du chaos”, texte rédigé pour le Digita Deli, depuis réédité et que je vous recommande fortement). Plus nous communiquerons, plus nos libertés seront remises en cause, pourrait-on lui répondre 25 ans plus tard…

“Ce n’est pas une crise, c’est une révélation. Ce n’est pas le chaos, c’est la revanche du réel. Ce n’est pas la fin, mais peut-être bien le début. Ils vont tenter de nous vendre au prix du sang leur monnaie de singe et leurs rêves de pierre, pour perpétuer le système. Le leur. Celui qui leur profite. La vraie révolution, c’est de cesser de les croire, ne plus avoir peur et passer à autre chose, maintenant, ici et partout. C’est pour cela que l’âge de la critique se termine ici et que commence enfin l’âge de faire” (Agnès Maillard, 8 octobre 2008)

Aujourd’hui est un jour ordinaire. Ceci n’est ni une crise, ni une séquence médiatique. Sir, c’est la naissance de bien pire…

[Article cross-posté depuis Nuesblog / Images : ‘toshops maison d’après Chaoxangel, Earlmadness et Bfsurfer94]

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