Eva Joly manque de carburant

Le 29 mars 2012

Après François Bayrou, Eva Joly se met a étudier le parc automobile français. Avec des estimations erronées, qui ne lui permettent pas de récupérer sa première place au classement de crédibilité des candidats à la présidentielle d'OWNI / i>TELE . Jean-Luc Mélenchon reste donc en tête, et Marine Le Pen dernière.

L’écart se creuse dans le classement du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude des déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à l’élection présidentielle. Jean-Luc Mélenchon confirme son avance avec 63,4 % de crédibilité, alors que les trois concurrents suivants (Joly, Hollande, Bayrou) se placent dans un mouchoir de poche. Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen restent sous la barre des 50 %.

Ces dernières 24 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 53 citations chiffrées des candidats à la présidentielle1. Résumé des quelques faits chiffrés qui ont retenu notre attention.

Eva Joly au diesel

Pas de pitié pour les particules fines. Pour la candidate d’Europe-Ecologie Les Verts, invitée de la Matinale de Canal+ le 27 mars dernier, c’est “un sujet majeur et complètement ignoré”.
Elle identifie clairement le coupable de cette pollution :

C’est le parc automobile diesel qui est responsable de ces particules fines. Nous avons le parc automobile le plus absurde au monde, nous avons presque 80 % de nos véhicules en diesel.

En évoquant “le parc automobile”, Eva Joly fait référence aux voitures particulières et aux véhicules utilitaires légers. Le bilan Transports 2010 du SOes (service statistique du Ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement) publie le nombre, depuis 2004, de véhicules par type de carburant. La montée en puissance du diesel par rapport à l’essence est nette, comme en témoigne le graphique suivant.

Les véhicules diesel sont passés de 17,580 millions en 2004 à 22,991 en 2010. Cependant, ils ne représentent en 2010 “que” 62,16 % du parc automobile français.Bien loin des 80 % évoqués par Eva Joly.

François Bayrou sort du bois

La filière forestière a fait son apparition en force dans la campagne de François Bayrou. Après une journée entière consacrée à cette activité dans le Loiret le 26 mars, le candidat MoDem la mentionne à plusieurs reprises dans le discours qu’il a prononcé à Besançon le lendemain, le 27 mars2. Il s’autorise même une petite balade en forêt, au risque de s’y perdre :

La forêt française est la troisième forêt du continent européen (…) Cette forêt française, elle est de 20% supérieure à la forêt allemande (…) “les Polonais (…) pour une forêt à peu près d’une même surface que la nôtre (…).

Selon les données 2010 fournies par la Banque mondiale, la surface forestière de la France s’étend sur 159 540 km². Cette surface n’est ni la troisième du continent européen, ni 20 % supérieure à celle de l’Allemagne et encore moins équivalente à celle de la Pologne.

Même sans compter la Russie dans l’Europe, la France ne se place qu’à la quatrième place en terme de surface boisée sur le continent, derrière la Suède (282 030 km²), la Finlande (221 570 km²) et l’Espagne (181 730 km²). Comparée à l’Allemagne (110 760 km²), elle se révèle non pas 20 mais 30% plus étendue. Quant aux forêts polonaises (93 370 km²), elles s’enracinent sur une surface 41,5% moindre que les sous-bois français.

Jean-Luc Mélenchon succombe à l’appel des profondeurs

Alors que François Bayrou explore des forêts aux surfaces fantasmatiques, le candidat du Front de Gauche s’intéresse quant à lui à une autre ressource naturelle, les océans. Et les espèces qui les peuplent. Ainsi, a-t-il estimé lors de son meeting à La Réunion le 25 mars :

70% de la surface du globe, c’est de l’eau, c’est la mer (…) la mer dont 15 % à peine des espèces qui y vivent sont connues.

La première estimation de Jean-Luc Mélenchon est correcte : le site du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) note que les océans couvrent effectivement 70 % de la surface de la Terre.

Côté faune, le candidat du Front de Gauche est plus imprécis. Selon le recensement 2010 du Census of Marine Life, organisation scientifique internationale regroupant plus de 80 pays et 2 700 scientifiques, 250 000 espèces sous-marines sont actuellement connues. L’organisme précise également que “le recensement ne peut toujours pas estimer le nombre total d’espèces, de formes de vie, connues et inconnues, dans l’océan. Il pourrait logiquement extrapoler à au moins un million de formes de vie sous-marines entrant dans la catégorie des espèces”. L’association WWF livre d’ailleurs la même estimation.

Les données existantes sur la proportion d’espèces sous-marines connues ne sont donc pas claires et définitives. Les estimations de ces deux organismes de référence – autour de 25 % d’espèces sous-marines connues – ne sont pas équivalentes à celle de Jean-Luc Mélenchon.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
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Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

  1. L’équipe du Véritomètre a fixé des seuils de tolérance pour l’évaluation des chiffres des candidats : si la marge d’erreur entre le chiffre évoqué par le candidat et la donnée officielle disponible est comprise entre 0 et 5 %, nous considérons la citation comme “correcte” ; si la marge est entre 5 et 10 % on la qualifiera d’”imprécise”, enfin si la marge est de plus de 10% nous l’évaluerons comme “incorrecte” []
  2. la vérification entière du discours de François Bayrou à Besançon sera mise en ligne sur le Véritomètre dans les prochains jours []

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